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Se former et analyser sa propre pratique. Revue Hypnose et Thérapies Brèves 68.

Pour améliorer ses résultats au quotidien.
Grégoire VITRY (PhD) (1), Emmanuelle GALLIN, Audrey BECUWE (PhD, HDR)



Se former et analyser sa propre pratique. Revue Hypnose et Thérapies Brèves 68.
Améliorer sa pratique de thérapeute par l’évaluation et l’observation, quelle que soit son approche, et tisser une nouvelle relation avec ses patients, c’est tout l’intérêt de l’expérience SYPRENE. Décryptage et explications.

Après quatre ans de formation, Anne-Charlotte de Maupeou, membre du réseau SYPRENE (Systemic Practice Research Network), praticienne en hypnose et clinicienne de la relation, témoigne des changements qui se sont installés dans sa relation au patient depuis qu’elle utilise l’évaluation et l’amélioration de pratique : « L’analyse de ma propre pratique me permet de mettre la relation au coeur du changement et d’améliorer mes résultats. » Qu’est-ce que l’amélioration et l’évaluation de pratique ? Comment induit-elle une amélioration des résultats ?
Comment crée-t-elle un changement dans la pratique thérapeutique et dans la relation au patient ? Comment s’est développée cette pratique ? Revenons sur cette nouvelle discipline et ses rouages internes.

L’EXPÉRIENCE SYPRENE
L’amélioration de pratique en tant que discipline à part entière découle des résultats liés au réseau SYPRENE de pratique de recherche (PRN - Practice Research Network) mis en place en 2014 par le centre de recherche LACT pour combler le fossé entre praticiens et chercheurs. Dans le but d’évaluer, au départ, l’efficacité et l’efficience de la thérapie systémique stratégique et d’observer les processus d’intervention et de changement, SYPRENE rassemble une vingtaine de membres praticiens originaires de sept pays différents. De nombreuses institutions et centres de recherche ont rejoint ce programme : LACT (Paris), le Laboratoire de psychopathologie et de neuropsychologie de l’université de Paris 8, le CERMES3 (CNRS), le Centre de thérapie stratégique d’Arezzo (Italie) du Pr. Giorgio Nardone, le MRI de Palo Alto (Californie), le centre de formation CIRCÉ (Paris) fondé par Teresa Garcia, l’université UNAM - National Autonomous University of Mexico (Mexico City), l’Institut Mimethys (Nantes) du Dr. Eric Bardot, ou encore la University of Louisiana-Monroe (Louisiane). Pensé au départ comme un outil au service de la recherche, SYPRENE est devenu avant tout un puissant outil d’observation et d’évaluation de pratique au service de l’amélioration des résultats pour tout praticien professionnel, quelle que soit son approche (hypnose, systémique, TCC...). Plusieurs questionnaires rapides (moins de 30 secondes) permettent à l’intervenant d’évaluer de façon quantitative et qualitative à la fois l’alliance thérapeutique avec le SRS (Miller & Duncan, 2004) et l’état de bien-être contextualisé (individuel, interrelationnel, social et global) avec l’ORS (Miller & Duncan, 2004). Le GHQ 12 (Goldberg, 1972) clarifie l’état de bien-être du point de vue de l’individu. Enfin la question de l’échelle (2) évalue l’évolution de la résolution de problème du point de vue du patient et de celui du thérapeute.

On a pu ainsi établir – pour l’approche systémique stratégique – en analysant les interventions de 22 thérapeutes avec 1 150 patients, une amélioration significative ou une résolution complète du problème dans 79 % des cas, avec une moyenne de 5,4 séances et une durée de traitement de 5,3 mois (Vitry et al., 2021).

Mais au-delà de ces calculs statistiques, les intervenants ont témoigné d’une amélioration de leur pratique qui s’explique notamment par le rôle central d’une prise en compte rigoureuse et globale du feedback dans ce processus d’amélioration continue. Les questionnaires permettent au praticien et au patient d’avoir un feedback sur l’avancée de la situation au fur et à mesure de la thérapie et de procéder à des ajustements, chemin faisant. C’est, nous rappelle Anne-Charlotte de Maupeou, « l’observation de mon propre travail, de la relation et des processus qui me permet d’améliorer ma propre pratique en utilisant l’interface SYPRENE, au fur et à mesure des séances. »

Décryptons... Le terme de feedback n’est pas employé dans un cadre conceptuel théorique, mais il désigne « la manière dont le thérapeute peut savoir que la relation dans laquelle il s’engage avec le client progresse bien vers une issue thérapeutique. L’intégration des points de vue fait partie de ce nouveau paradigme à la fois dans la recherche et la pratique » (Duncan et al., 2012, p. 15). Dans SYPRENE, le feedback mesuré grâce à l’échelle ORS, SRS et GHQ12 permet au praticien de faire évoluer l’intervention en fonction des évolutions des évaluations. Le réajustement de la thérapie renforce d’autant l’alliance thérapeutique que le patient se sait écouté et impliqué dans le processus de changement. Duncan et al. (2012) concluent que la combinaison d’une mesure du progrès et de l’apport du feedback à l’intervenant « produit constamment un changement cliniquement significatif, avec des effets du traitement dépassant tout ce que l’on avait pu voir dans la littérature concernant ce que l’on nomme la psychothérapie appuyée empiriquement (“empirically supported psychotherapy”). Les taux de dégradation sont réduits de moitié, tout comme l’abandon. Adjoignez un feedback (au thérapeute) concernant l’évaluation formelle de la relation par le client, et ce dernier est moins susceptible de connaître une dégradation de son état, a une plus grande probabilité de rester davantage de temps, et a deux fois plus de chances d’arriver à un changement cliniquement significatif » (2012, p. 68).

COMMENT LE FEEDBACK AMÉLIORE LA PRATIQUE POUR TOUT INTERVENANT ?
Watzlawick et al. (1975, p. 28) identifient deux types de changements : le premier, issu de la théorie des groupes, « prend place à l’intérieur d’un système donné, qui, lui, reste inchangé » ; le second, résultat de la théorie des types de logique, modifie le système lui
-même. Le rôle du feedback dans le processus de changement a été souligné par l’école de Palo Alto qui attribue ces changements de types 1 et 2 à deux niveaux d’apprentissage : celui qui permet des transformations internes au système donné (type 1),….

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GRÉGOIRE VITRY
Chercheur en psychologie et sociologie à l’université de Paris
-Descartes (Cermes3) et Paris 8. Thérapeute systémicien, directeur de LACT et président de Sypres (Syndicat des praticiens en systémie). Diplômé de l’Ecole de Palo Alto, il se passionne pour le monde de la complexité depuis de nombreuses années. Il développe depuis 2016 SYPRENE, un réseau PRN (Thurin et al., 2012) en approche systémique permettant notamment d’améliorer sa pratique en étroite collaboration avec le monde universitaire. Coauteur pour les ouvrages Quand le travail fait mal (InterEditions, 2017) et Stratégies de changement : 16 prescriptions thérapeutiques (Erès, 2020).

EMMANUELLE GALLIN
Thérapeute systémicienne, chargée de recherche à LACT et doctorante en sciences de gestion à l’université de Limoges. Ses recherches portent sur le rôle des croyances dans le modèle de Palo Alto. Professeure de yoga spécialisée dans la régulation des troubles sensoriels, elle est également l’auteure de TSA-TED-TDAH, ce yoga est pour vous.

AUDREY BECUWE
Maître de conférences HDR en sciences de gestion à l’IAE de Limoges. Chercheur en gestion des ressources humaines et comportement organisationnel, systémicienne. Ses recherches portent sur la gestion des compétences, la gestion de la diversité et l’engagement organisationnel. Elle a publié, entre autres, dans la « Revue de gestion des ressources humaines », la revue « Travail, genre et sociétés », la « Revue des sciences de gestion ». Membre scientifique de la revue « Humanisme et entreprise ».


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- Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente dans son édito le contenu de ce n°68 :

Comment devenir un meilleur thérapeute ?

Cette question est au centre de notre pratique, elle implique la « présence » du thérapeute dans une approche centrée sur le corps relationnel, ainsi que la mise en place d’évaluations visant à améliorer la qualité du lien thérapeutique.


. François Cartault nous montre comment le travail sur le deuil implique de retrouver la relation perdue comme étape initiale avant de développer l’autonomie de la personne endeuillée. Dans la séance présentée, le questionnement narratif met en évidence l’importance de décrire les différences et les points communs entre les sujets pour enrichir et faire perdurer la relation.
. Solen Montanari nous décrit la situation d’Elisa, 14 ans, qui a perdu toute confiance, un « truc » l’empêchant de lâcher prise dans la relation de soin. Selon l’approche TLMR (Thérapie du lien et des mondes relationnels) qu’elle pratique, elle intègre sa propre résonance (image d’un iceberg et vécu de chair de poule) pour co-construire un imaginaire partagé où le thérapeute et Elisa regardent ensemble la scène et en ressentent les effets sous forme d’une expérience unique.
. Sylvie Le Pelletier-Beaufond nous fait part de son expérience des séances d’hypnose partagées avec François Roustang. Elle souligne l’importance de la ''présence'' pour François Roustang dans sa manière de constituer une relation thérapeutique. Elle rappelle le principe qui gouverne sa pensée, l’existence de deux registres distincts : une forme discontinue correspondant à la dimension de l’individualité, et une forme continue, un fond, constitué de l’ensemble du système relationnel correspondant à la dimension de la singularité.

Ces trois auteurs mettent en scène ce qui est au centre de l’utilisation de l’hypnose en thérapie : le développement d’un processus coopératif où la présence du thérapeute est renforcée par le fait que ce dernier ne pense pas à la place du sujet.

. Grégoire Vitry et ses collaborateurs nous montrent comment la participation de chaque thérapeute à un réseau d’évaluation de sa propre pratique (Réseau SYPRENE) favorise une amélioration de notre pratique. Dans ce travail de recherche portant sur les effets de l’évaluation de l’alliance thérapeutique et de l’état de bien-être, nous comprenons l’importance de tenir compte de la perception du sujet et de partager avec nos pairs.

- L’édito de Gérard Ostermann dans l’Espace Douleur Douceur souligne l’importance de la capacité du thérapeute à faire un « pas de côté » pour rendre l’hypnose vivante dans les soins.

- Chirurgie maxillo-faciale en mission humanitaire, un article de Christine ALLARY

- Olivier de Palezieux nous parle du placebo

- Corps et espace sécure: changer le monde du patient par Jean-François DESJARDINS

- Dans le dossier consacré aux addictions, une constante est l’absence de confiance dans la relation humaine. Les trois auteurs, Maxime Devars, Anne Surrault et Nathalie Denis, nous proposent différentes manières de se libérer des symptômes bloqueurs de la relation (hyperactivité dans l’anorexie, conduite automatique chez le fumeur). Ils s’appuyent sur leur créativité et un imaginaire donnant toute sa place à la stratégie pour que les sujets puissent se réapproprier leur responsabilité dans le soin.

Nous retrouvons la qualité des chroniques habituelles, l’humour de Stefano et Muhuc, les situations cliniques richement décrites par Sophie Cohen, Adrian Chaboche et Nicolas D’Inca : à lire et à se laisser imprégner.

Ce numéro rend également hommage au Professeur Peter B. Bloom, ancien président de l’ISH qui vient de nous quitter le 10 septembre 2022 à l’âge de 86 ans. Dans une interview donnée à Gérard Fitoussi, il souligne l’importance de la créativité dans notre pratique et son espoir que l’hypnose continue à favoriser les rencontres et à nous faire partager des histoires de vie.

Crédit photo © Michel Eisenlohr


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Rédigé le Samedi 26 Août 2023 modifié le Samedi 29 Juin 2024
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Laurence ADJADJ
Présidente de France EMDR-IMO ®, Dirige le Cabinet d'Hypnose, EMDR-IMO de Marseille. Présidente... En savoir plus sur cet auteur





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