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On ne saurait se passer des étoiles... Marc-Alain OUAKNIN

« L’Enfer est une grammaire privée du futur. » Ossip Mandelstam



UNE COMMUNAUTÉ D’ÉTUDE

Lors de la période si étrange et si inquiétante que fut le « confinement » mondial de ces mois de mars-avril-mai 2020, j’ai fait l’une des expériences intellectuelles, spirituelles et humaines les plus fécondes de mon existence. Sans perdre la lucidité du malheur de tous les malades et de leurs souffrances et de tous les morts et du deuil de leurs familles qui nous entouraient, j’ai vécu, avec d’autres personnes, une forme de résistance à la peur, la douleur, la solitude et à la tristesse en créant une communauté d’étude réunissant des personnes de tous horizons avec qui j’ai partagé « une heure d’étude par jour » pendant sept semaines, à raison de quatre jours par semaine.

A l’initiative et sur une idée originale de Françoise-Anne Ménager, directrice de l’Institut Targoum-Irets (Institut de Recherches et d’Etudes sur la Traduction des Textes sacrés), nous avons proposé l’étude d’un mot par jour en relation avec la situation sanitaire que nous traversions et avec l’expérience du confinement que nous étions en train de vivre.

L’expérience de cette « communauté d’étude » fut rendue possible par une logistique mise en oeuvre par Jean-Jacques Krief, directeur de la communication de Targoum-Irets, et par la supervision d’Emmanuel Dyan, président de Targoum-Irets. Laurent Picard, responsable de l’antenne de l’Atelier Targoum à Aix-en-Provence, a joué un rôle important dans l’apport de certaines idées développées dans ces études.

Furent ainsi étudiés les mots et expressions : confinement ; masque ; nous ; fenêtre ; épidémie ; espérance ; inconnu ; tu ; ordre ; caché ; nation apprenante ; nouveau ; crise ; silence ; temps ; ensemble ; nom ; chant ; livre ; caverne ; rituel ; proche ; dix ; lavage des mains ; guérison ; joie ; oiseaux.

Les mots furent choisis au fur et à mesure de l’évolution de l’étude par Françoise-Anne Ménager, qui en a offert à chaque fois les grandes orientations et leurs développements. Nous avons mis au service de ces études le travail en binôme que nous pratiquons ensemble, Françoise-Anne et moi, depuis une vingtaine d’années dans le développement de l’Institut Targoum, mais aussi le travail que nous menons ensemble sur France Culture dans le cadre de l’émission Talmudiques.

Nous avons suivi le même plan pour chaque étude. Tout d’abord la construction d’un « lieu commun » symbolique. Il était important en effet, pour avoir le sentiment d’être ensemble et non éparpillés aux quatre coins du monde devant son ordinateur, que l’on se réunisse symboliquement dans un même lieu, en faisant découvrir et visiter chaque jour une nouvelle bibliothèque, un musée, un jardin, etc. Après cette mise en place le « Mot Du Jour » était dévoilé sur une petite grille de mots croisés qui s’est remplie au fil des jours. Le « Mot Du Jour » choisi était ensuite analysé sous toutes ses coutures, d’abord étymologiques : grec, latin, français et hébreu. Chaque fois la découverte de la polysémie de chacun de ces mots conduisit à des réflexions philosophiques, psychologiques, littéraires, politiques et poétiques. Chaque séance se termina en effet sur la lecture d’un poème ou d’un court texte littéraire en relation avec la problématique étudiée.

Quel bonheur d’avoir pu croiser sur sa route Baudelaire, Bialik, Victor Hugo, Saint-John Perse, René Char, Rabbi Abraham Isaac Kook, Philip Roth, Rachi, Albert Camus, Marc Cohn, Pessoa, Valère Novarina, Roberto Juarroz, Sander et Trenel, Pierre Bettencourt, Roland Barthes, Marcus Jastrow, Rabbi David Qimhi, Levinas et Ricoeur, Jabès, Gaffiot, Bailly, Chalier, Kafka, Bachelard, Leiris... et de nombreux autres écrivains, auteurs de dictionnaires, philosophes, architectes et poètes !


L’ÂME DES DICTIONNAIRES

Ce sont les dictionnaires (Larousse, Robert, Bailly, Gaffiot, CNRTL, Rabbi David Qimhi, Sander et Trenel, Marc Kohn, Jastrow, Kadouri) qui furent l’âme de ces études, nous offrant à chaque fois des surprises inattendues sur les sens de ces mots. Qui aurait pensé que « tu » est, en hébreu, le même mot que la « bêche » qui permet de retourner la terre ? Qui aurait pu imaginer que ce même mot « tu » signifiât aussi le verbe « venir » ? A qui serait venue l’idée que, toujours en hébreu, qui fut l’une des langues prépondérantes de nos études, la « corde » et « l’espérance » se disent avec le même vocable ? Comment comprendre que les mots « paupière » et « oiseau » sont irrigués par la même racine ? Comment et pourquoi le mot « livre » signifie aussi la « frontière » et le « coiffeur », sans oublier le « nombre » et le « récit » ? Pourquoi « rêver » et « guérir » appartiennent-ils à la même racine ? Comment se fait-il que le « je/ani » se retrouve dans le mot « bateau/ oniya » ? Et pourquoi la racine de l’expression « être ensemble », yahad, est-elle la même que « se battre en duel » ? Par quel mystère le « chant » est-il le même mot que celui qui dit le « taureau » ? Et pourquoi le « silence/dom» rencontre-t-il le « sang/ dam » ? Pourquoi les maîtres du Talmud interprètent la « guérison » comme « l’art de dénouer les noeuds » ?

Voilà quelques-unes des questions que nous avons rencontrées au cours de ce véritable marathon de mots. Il existe un plaisir d’entendre les mots sous les mots, les sons sous les sons, hypogrammes balbutiants qui jouent d’une langue à l’autre. Comme l’écrit si merveilleusement Valère Novarina : « Les mots agissent aussi par quiproquo, en résonnant dans le sous-sol verbal ; ils ont leurs tremblements, leur chassé-croisé phonique, leurs jeux souterrains, leur vie équivoque ; il y a sous les mots des rivières qui agissent par voisinage et leur donnent une profondeur ombrée. » Valère Novarina qui ajoute que « l’ombre d’une langue sous l’autre diffuse toujours sa lumière par dedans : un verbe est sous un verbe, agissant, […] l’hébreu sous le grec, le grec sous le latin, le latin sous notre langue. […] Contrepoint profondément tissé qui donne auditivement toute sa profondeur à la Bible, toute sa perspective – qui ouvre son spectre temporel et qui fait qu’elle va très vite loin en plusieurs sens, comme la musique fuguée et comme le paysage de montagne où l’espace s’approfondit, fuit, se renouvelle à chaque pas du marcheur et de celui qui écoute » (2).

Dans ces 27 études, nous nous sommes ainsi particulièrement promenés dans les allées des dictionnaires, chemins forestiers où les mots plongent leurs racines dans les profondeurs d’une histoire voyageuse multiséculaire. Nous avons rêvé et flâné d’un mot à l’autre, d’une racine à l’autre. Les vocables nous les avons respirés, rapprochés, comparés, combinés, conjugués, séparés, opposés, fraternisés, cousinés aussi. S’ils vivent ensemble sur la même page, sans doute ne sont-ils pas si étrangers les uns avec les autres.


A LA RACINE DES MOTS

Dans chacune de ces études nous avons suivi la méthode que je pratique toujours pour progresser dans la forêt touffue des textes et des idées. J’ai montré, avec Novarina, comment « je n’utilise pas les mots », comment « je n’en ai jamais cherché aucun ». J’ai insisté sur le fait que les mots « ne sont pas des outils », que « devant le langage, les sensations sont de l’ordre du toucher : quelque chose parle là, derrière l’oreille. On ressent la matérialité de tout. Les mots sont comme des cailloux, les fragments d’un minerai qu’il faut casser pour libérer leur respiration. Tout un livre peut provenir d’un seul mot brisé. Le mot est fermé, enveloppé, secret, enfoui : quelque chose doit apparaître de dedans – de l’intérieur du mot et pas du tout de l’intérieur de l’écrivain. Les mots en savent beaucoup plus que nous – mais il faut les prendre avec amour entre ses mains et les porter à son oreille. Les mots sont au sol, incompréhensibles et comme des noyaux. Je les ramasse, j’écoute dedans ; je les brise : apparaît une phrase, une scène, toute la construction respiratoire du livre » (3).


UNE FORME DE BIBLIOTHÉRAPIE

Et si pendant cette période nous avons eu la chance immense de ne pas être malades, le contexte épidémiologique nous fit cependant prendre conscience à quel point cet engagement dans l’étude en commun avait sans doute produit un effet thérapeutique, je dirai précisément bibliothérapeutique. Et j’aime à me souvenir ici de cet enseignement du Talmud concernant le verset de l’Exode, chapitre 15, 26 : « Et Dieu dit : Si tu écoutes attentivement la voix de l’Eternel, ton Dieu, si tu fais ce qui est droit à ses yeux, si tu prêtes l’oreille à ses commandements, et si tu observes toutes ses lois, je ne te frapperai d’aucune des maladies dont j’ai frappé les Egyptiens ; car je suis l’Eternel, qui te guérit. »

Les commentateurs demandent pourquoi le Dieu biblique se présente comme médecin s’il précise qu’il n’enverra pas de maladie ? Et de répondre que c’est justement le sens du médecin, de prendre soin des personnes afin qu’elles ne tombent pas malade. La médecine a une fonction préventive et non seulement curative.

L’étude en ces jours de confinement a été sans aucun doute un des facteurs qui a permis à de nombreuses personnes de surmonter cette crise sans sombrer dans la tristesse, la solitude et l’ennui. Ce fut, on peut le penser, une activité « antidépressive », si on peut se permettre cette expression, et plus encore une façon de se construire et de se reconstruire, s’inventer et se réinventer jour après jour. La mobilisation de l’esprit par la recherche, la découverte de nouvelles idées, la surprise de chaque mot nouveau et de ce qu’ils apportaient comme sens inédits, l’attente d’une heure de rendez-vous, les conversations, courtes mais inscrivant dans le monde commun, la possibilité de réagir en échangeant, tout cela a sans doute contribué à maintenir la tête hors de l’eau, ou peut-être comme le dit une blague juive, à apprendre à vivre sous l’eau.

ETRE HEUREUX

MARC-ALAIN OUAKNIN

Professeur des universités (Bar-llan, Israël), philosophe, rabbin et coproducteur avec Françoise-Anne Ménager de l’émission Talmu- diques sur France Culture. Auteur de plus d’une trentaine d’ouvrages traduits dans le monde entier, ses recherches portent sur l’herméneutique, les relations entre la pensée juive et la philosophie, la littérature, les arts et la psychanalyse. Il poursuit ses travaux sur la traduction de la Bible hébraïque au sein de l’Institut Targoum-Irets. Il vient de faire paraître le premier tome de sa nouvelle traduction : La Genèse de la Genèse, aux Editions Diane de Selliers.

Pour lire la suite...

N°58 : août/septembre/octobre – Parution le 31 juillet

Dossier : crise et après-crise
Le dossier de ce n°58 est consacré aux conséquences de la crise sanitaire sur les patients et aux pratiques thérapeutiques qui en découlent.

- Edito : Sophie Cohen

- On ne saurait se passer des étoiles. Marc-Alain Ouaknin, philosophe

- Leçon d’un confinement. David Le Breton, sociologue

- L’angoisse de mort. Véronique Cohier-Rahban, psychothérapeute

Espace Douleur Douceur

- Modifier nos pratiques thérapeutiques ? Henri Bensoussan, médecin hypnothérapeute


- Une bulle d’oxygène. Au centre hospitalier de Bligny. Agathe Delignières, psychologue

- L’expérience sécure. Développement du « lieu sûr ». Arnaud Zeman, Hypnothérapeute

Dossier « Crise et après crise »

Edito : Sophie Cohen

- La tulipe et le saule pleureur. Un conte de Jean-Marc Benhaiem, médecin hypnothérapeute

- 17 jours dans les griffes du Covid-19. Un témoignage d’Olivier Debas, médecin urgentiste, touché par la maladie.

- Ecrire pour sortir du problème. Vania Torres-Lacaze, Guillaume Delannoy, Annick Toussaint responsables de l’IGB

- Confinement : corps, émotions et représentations psychiques. Bruno Dubos

- Quiproquo, malentendu et incommunicabilité : « période bousculée ». Stefano Colombo et Mohand Chérif Si Ahmed (alias Muhuc)

- Les champs du possible : Connaître de l’Autre, Soi-même. Adrian Chaboche, spécialiste en médecine générale et globale

- Culture monde : Chamanisme chez les indiens Shipibos-Conibos. Jean-Marc Boyer, psychopraticien

- Les grands entretiens. Réglementer la pratique de l’hypnose. Entretien avec Gérard Fitoussi, président de la CFHTB

- Livres en bouche
- Ouvrages de David Le Breton




Rédigé le Mardi 20 Octobre 2020 modifié le Vendredi 20 Novembre 2020
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Laurent Gross
Vice-Président de France EMDR-IMO ® Président du Collège d'Hypnose et Thérapies Intégratives de... En savoir plus sur cet auteur





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